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SOUVENIRS D’UNE MORTE VIVANTE

nous embrassâmes et je repartis rejoindre les nôtres.

Notre bataillon ayant été très éprouvé dans la journée nos amis avaient été mis en réserve ; les survivants qui avaient pris part au combat, n’allèrent pas au feu ce soir-là.

Nous sommes retournés au petit séminaire, cette fois nous y avons été très bien reçus, l’état-major était revenu là, j’étais toujours avec eux. Nous préparâmes le souper, on nous permit de manger dans le réfectoire, les pères nous avaient prêté la vaisselle nécessaire pour notre dîner, ils nous avaient même préparé des lits pour nous reposer si nous le désirions, pour moi, ils m’offrirent pour dormir, une petite chambre au rez-de-chaussée, très propre, que j’ai acceptée avec plaisir, car j’étais bien sale, j’avais grand besoin de faire ma toilette.

Quelle que soit leur opinion, ils ont été bienveillants pour nous ; malheureusement, nous n’avons pas pu profiter de leur offre. Lorsque nous étions en train de manger, nous reçûmes une décharge bien nourrie, toutes les vitres se brisèrent avec un fracas terrible, nous étions bombardés presqu’à bout portant, le séminaire tremblait sur sa base, c’était effrayant, les moines étaient épouvantés ; deux heures durant, nous avons été assaillis de toute part. Les Versaillais avaient eu connaissance de notre présence au petit séminaire, ils n’épargnèrent pas le couvent espérant nous atteindre. Nous pensions avoir été trahis. Il était environ 11 heures du soir lorsque nous descendîmes dans le jardin, presque tous les murs étaient ébranlés, criblés par les