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CINQUIÈME PARTIE

Dans cette reprise du fort et du Parc d’Issy, il y a eu des actes de bravoure et d’héroïsme exécutés par notre bataillon. Le lieutenant Berjaud, plusieurs fois sous une grêle de mitraille, est allé chercher des munitions pour ses hommes qui en manquaient. Sebire, nommé capitaine sur le champ de bataille, ainsi que le capitaine Marseille ont, avec une grande énergie, défendu le drapeau qui a été à nouveau percé de trois balles. Le capitaine adjudant major Martin, commandant du fort d’Issy, les capitaines Letoux, Napied se sont particulièrement distingués, ainsi que Ménard, sous-lieutenant et Devrigny, qui ont montré un grand sang froid et un grand courage. Le sergent Laurent de la première compagnie qui a été tué, fut mis à l’ordre du jour. Fabre, blessé mortellement, également. Ces deux derniers étaient les bons amis qui, le matin, tout joyeux, étaient revenus de la cueillette d’oseille pour la soupe qu’ils avaient faite avec tant de plaisir, et qui ne fut mangée par personne.

Ces deux bons garçons sont morts dans l’ardeur du combat, ils sont morts heureux. Le sergent de la 2me compagnie fut aussi grièvement blessé.

À 4 heures on sonna la retraite. Le drapeau des ambulances fut hissé ; ordre fut donné de cesser le feu ; en hâte je m’approche de la tranchée, j’eus un moment de terrible angoisse et de rage. Tous ces pauvres enfants, qui le matin étaient encore si gais, remplis d’enthousiasme et d’amour pour la liberté, ont donné si généreusement leur vie pour sauver la République, espérant encore sauver la France.