il avait encore l’air bien, quoique légèrement indisposé. Dans le quartier quand on apprit sa mort, tout le monde fut surpris.
Le lendemain matin à huit heures on alla faire la déclaration mortuaire à la mairie.
On aurait dit que tout ce que j’avais aimé devait disparaître, je devins insensible à la douleur physique., Tant de choses arrivent dans la vie auxquelles on suppose ne pouvoir survivre, elles se produisent imperceptiblement, graduellement, elles s’accomplissent presque inconsciemment, et l’on n’en meurt pas !
En contemplant mon fils que j’adorais, petit être né pour la souffrance, si je détache mon sentiment égoïste de mère, je pense qu’il a assez vécu, d’autres malheurs l’attendaient sans doute. Dans ces années néfastes, la vie était si triste.
Nous passâmes cette troisième nuit sans nous coucher, on n’y pensait pas ; depuis la guerre, on était habitué aux nuits blanches. Chacun de nous était livré à ses propres pensées ; moi, j’étais assise auprès du berceau de mon ange, je n’avais plus que quelques heures pour être auprès de lui, après, c’était fini pour toujours ; je pensais au néant de la vie.
À minuit on frappa à notre porte, cela nous surprit, ma mère alla ouvrir, c’était un monsieur que nous ne connaissions pas ; il demanda mon mari. Il dit son nom, nous l’introduisîmes dans la chambre voisine, mon mari alla vers lui ; c’était un de ses compagnons de combat, malheureusement il venait chez nous en une bien triste nuit ; mon mari lui dit ce qui se passait