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QUATRIÈME PARTIE

cour des comptes, et en plusieurs lieux officiels de l’arrondissement.

Le 11 février Paris commençait à avoir à manger, mais il n’y avait ni travail, ni argent ; les 1 franc 50 ct. de chaque garde national n’allaient pas loin, plus 0,75 centimes pour sa compagne, s’ils avaient eu la veine d’être légalement mariés, (en un mot s’ils étaient des gens moraux). Pour les enfants, quelle idée !!! Pour toute la famille ils avaient 2 francs 25 ct. quel que fût le nombre des membres. Mais les autres pauvres diablesses qui avaient donné librement, honnêtement leur cœur et leur affection, elles n’avaient aucun droit, ni pour elles, ni pour leurs enfants ; donc 1 franc 50 ct., pour toute la nichée. Les petits bâtards avaient les miettes du festin. Pauvres enfants, ils n’avaient pas demandé à naître. Et nous étions en République !…

Oh Patrie ! qu’as-tu fait de tes enfants ! Telle était l’humanité de ceux qui t’ont conduite à l’abîme !

Le ravitaillement était un nouveau supplice pour ces pauvres déshérités ; ils ne pouvaient, devant ces étalages de légumes et d’autres provisions, que risquer un regard d’envie ; ils avaient eu si faim !

Le 26 février, les comités républicains et quelques membres de l’Internationale des Travailleurs avaient fait un appel à tous les régiments de la Garde Nationale de tous les quartiers.

Tous ceux qui voulaient sauver la République devaient se réunir place de la Bastille, autour de la Colonne de Juillet, ayant pour insigne un ruban rouge à la boutonnière, pour se compter, se reconnaître et se