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LA LOGIQUE DES STOÏCIENS

force lui trouver une analogie dans la philosophie moderne, rapprocher la logique des stoïciens.

Les arguments de M. Hamelin méritent une très sérieuse considération : en particulier il a mis en lumière, avec plus de précision et de force que personne ne l’avait fait avant lui, le caractère de rationalité et de nécessité apodictique que les stoïciens ont voulu par-dessus tout conserver à leur logique ; et, s’il était certain qu’il ne peut y avoir de nécessité et de rationalité que là où règne le principe de contradiction appliqué à des notions, il faudrait bien lui concéder que la logique des stoïciens, puisqu’elle est une logique, ne diffère pas très profondément de celle d’Aristote. Cependant, après mûr examen, il ne nous a pas semblé que la thèse de M. Hamelin fût exacte de tous points ; et comme il s’agit après tout d’une question assez importante pour l’histoire de la philosophie, on nous excusera d’y revenir encore une fois et d’essayer, malgré les difficultés qu’elle présente, d’y apporter quelque lumière.

Les textes indiqués par M. Hamelin à l’appui de son interprétation ne sont pas décisifs. Le passage de Sextus (Pyrrh., II, 101, 104) où se trouve formulée la définition du signe indicatif ou, ce qui revient à peu près au même pour les stoïciens, du signe en général, montre bien qu’entre l’antécédent et le conséquent il y a un rapport nécessaire. Il ne dit pas que ce rapport se réduise en dernière analyse à une identité, c’est seulement une séquence constante et nécessaire. On sait que c’est justement sur ce point qu’un long débat s’est élevé entre les stoïciens et les épicuriens, ces derniers admettant que le conséquent suit invariablement l’antécédent, les premiers exigeant en outre l’ἀκολουθία, c’est-à-dire l’impossibilité de poser l’un des termes sans l’autre. À la vérité, d’après un autre texte de Sextus et un autre de Plutarque indiqués également par M. Hamelin, certains stoïciens se montraient encore plus exigeants et voulaient que le lien unissant les deux termes fût ce qu’ils appelaient ἔμφασις (Pyrrh., VIII, 254 ; Plut., De εἰ ap. Delph., p. 387). Ce qui signifie que l’un et l’autre doivent être identiques, mais cette opinion nous est présentée comme ayant été défendue par quelques stoïciens, peut-être par ceux qui,