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LA THÉORIE PLATONICIENNE DE LA PARTICIPATION

porains, nous le considérons comme appartenant à la dernière période de la vie de Platon, et nous le situons soit avant, soit après le Théétète, en tout cas avant le Sophiste, le Politique, le Philèbe, le Timée et les Lois. Nous n’avons même pas l’intention d’analyser en détail, une fois de plus, le Parménide, encore moins de discuter les innombrables interprétations dont ce dialogue a été l’objet. Toutefois il sera nécessaire d’en résumer brièvement quelques parties afin de déterminer quel est, selon nous, le sens et quelle est la portée de l’ouvrage. Nous voudrions montrer comment le Parménide prépare l’établissement définitif de la théorie de la participation et comment il se complète par le Sophiste, où se trouve la solution de toutes les difficultés qu’il soulève.

Gomperz, dans le substantiel chapitre qu’il a consacré au Parménide, laissant de côté les interprétations plus ou moins ambitieuses où se sont complu, à la suite et à l’exemple des Alexandrins, beaucoup d’historiens modernes, se contente d’y voir un simple jeu dialectique. La raison qu’il invoque est que la dernière partie du dialogue, la plus importante à coup sûr et la plus difficile à interpréter, nous est expressément donnée par le principal interlocuteur comme un exercice dialectique destiné uniquement à préparer le jeune Socrate à approfondir ces difficiles problèmes, et qui n’engage en aucune façon la pensée de l’auteur du dialogue puisqu’il n’aboutit à aucune conclusion. Cette opinion de Gomperz nous paraît incontestable et réalise à nos yeux un grand progrès sur toutes les interprétations antérieures. Ajoutons que non seulement le Parménide est un exercice dialectique, mais qu’il est appelé par Parménide lui-même, dans un passage auquel les critiques antérieurs n’ont peut-être pas attaché une assez grande importance : « un jeu laborieux et pénible ». 137, B : πραγματειώδη παιδιάν.

Nous voudrions seulement serrer la question d’un peu plus près et essayer de démêler en quoi consiste précisément ce jeu si compliqué, et dans quelle intention ou avec quelle arrière-pensée Platon a pris plaisir à le jouer. Le début de l’ouvrage nous paraît offrir à ce point de vue une indication précieuse. Ce n’est sans doute pas sans intention que Platon, dans une sorte de prélude, met en scène Zénon d’Élée en