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PHILOSOPHIE ANCIENNE

de l’âme, analyse minutieusement les fonctions de tous nos sens. Ses théories sur la vision et la perception de la lumière sont, entre autres, des plus originales et ont été souvent discutées. Le plaisir et la douleur reçoivent aussi leur explication. Et l’on peut s’assurer que la future définition aristotélique du plaisir gardera de celle de Platon tout ce qu’elle a d’essentiel en y mettant plus de précision. Platon ne nous dit-il pas, en effet, que toute impression qui se fait en nous contre nature et par violence est douleureuse, tandis que celle qui est forte, mais conforme à la nature, est agréable ? Le philosophe s’étend ensuite, et assez longuement, sur les propriétés diverses de nos organes, entre autres, sur les fonctions prophétiques du foie. Puis il décrit les différentes maladies du corps en s’inspirant, selon toute vraisemblance, d’Hippocrate. Et le Timée s’achève une fois tout l’univers non seulement passé en revue, mais encore expliqué. On peut, en effet, dire de ce dialogue qu’il embrasse dans une synthèse, il est vrai confuse, mais complète, toutes les sciences que l’on distinguera plus tard sous les noms d’astronomie, de physique, de chimie, de physiologie, de médecine, etc. Et ce n’est pas sans un légitime orgueil, dont il a d’ailleurs pleine conscience et devant l’expression duquel il ne recule pas, que le philosophe reconnaît la richesse, la nouveauté, l’originalité de ses explications. Platon est en effet le premier qui ait tenté une si audacieuse entreprise et qui ait essayé des choses une explication totale. On peut reconnaître que son audace a reçu sa récompense. Car, en dépit de ce que ses explications offrent aujourd’hui de suranné, ce sont elles qui s’imposeront jusqu’à l’avènement de la pensée moderne. Nous ne pouvions songer à en reproduire le détail puisque la part de vérité qui en subsiste est, aujourd’hui, tout à fait insignifiante, mais nous devions essayer de résumer ce grand et curieux essai de cosmogonie en raison de la grande influence qui lui était réservée dans l’avenir.