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Marie


 
Humble et bon vieux curé d’Arzannô, digne prêtre,
Que tel je respectais, que j’aimais comme maître,
Pour occuper tes jours, si pleins, si réguliers,
N’as-tu plus près de toi tes pauvres écoliers ?
Hélas ! Je fus l’un d’eux ! Dans ma douleur présente,
J’aime à me rappeler cette vie innocente ;
Leurs noms, je les sais tous : Albin, Élô, Daniel,
Alan du bourg De Scaer, Ives de Ker-ihuel,
Tous jeunes paysans aux costumes étranges,
Portant de longs cheveux flottants, comme les anges.
Oh ! Je pleurai d’abord longtemps et je gémis :
Pour la première fois je voyais mes amis,
Pour la première fois je quittais mes deux mères ;
D’abord je répandis bien des larmes amères.
Le travail arriva qui sut tout adoucir ;
Le travail ! mon effroi ! bientôt fit mon plaisir.
Le premier point du jour nous éveillait : bien vite,
La figure lavée, et la prière dite,
Chacun gagnait sa place ; et sur les grands paliers,
Dans les chambres, les cours, le long des escaliers,
En été dans les foins, couchés sous la verdure,