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Le Brigant et Le Jeune (Ar Jaouanq), tous deux de la fin du siècle dernier.

La grammaire de Le Gonidec, bien supérieure aux précédentes, ne laisse rien à désirer comme rudiment. La syntaxe en est bien établie. Nul n’avait indiqué la génération des verbes ; nul, ce parfait tableau des lettres mobiles dont les lois mystérieuses et multiples étaient si difficiles à découvrir. Quant à l’alphabet, il rend tous les sons des mots, laisse voir leur formation et se prête logiquement aux mutations des lettres : j’y regretterai une seule lettre correspondant au th kemrique ou gallois, son qui existe encore chez les Bretons, et que le z ne peut rendre. Les consonnes liquides soulignées, à peine sensibles pour quiconque ne parle pas la langue bretonne dès l’enfance, prouvent chez notre celtologue une finesse d’ouïe des plus rares. Jusqu’à cette dernière édition de la Grammaire, il n’avait pu, faute de caractères, indiquer ces consonnes ; sur quoi on lui dit que ce serait une difficulté pour bien lire sa Bible : « Oh ! répondit-il, je n’ai jamais employé ces sons liquides dans mes textes ! » Et pourtant, hors lui, puriste, qui s’en serait douté ? Savants, vous pouvez vous fier à la conscience de cet homme.

V

La hauteur de la pensée et celle du caractère s’unissaient chez M. Le Gonidec, vrai Breton. Tandis que par d’autres travaux philologiques, mais d’un intérêt moins proche pour la France, des savants ont vécu entourés de richesses et d’honneurs, lui n’eut, pour