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Songiez-vous quelquefois à ceux qui sont au bourg ?
Moi, je vous appelais, ô Maï ! le long du jour.
Je disais : « Quand viendront les vêpres du dimanche
Et ma brune Marie avec sa coiffe blanche ?
Quand reviendra le temps des nids et des chansons,
Et le jeu d’osselets derrière les buissons ? »
Mais j’appelais en vain ! Durant l’hiver, les fièvres,
Marie, avaient jeté leurs feux noirs sur vos lèvres,
Et votre bonne mère en ses deux pauvres bras
Vous serrait, et mouillait de ses larmes vos draps ;
Et puis, baisant la terre, aux anges, à la Vierge
Jurait une neuvaine et de brûler un cierge,
Et que, s’ils vous sauvaient, sur ses genoux, un jour,
Deux fois, de leur église, elle ferait le tour.
Oui, j’ai su ses tourments, ses cris de toute sorte.
Le soir, quand le vieux Dall quêtait à notre porte,
Je lui donnais son pain : « Ah ! disait le vieux Dall,
La mère a fait un vœu, car sa fille va mal. »
Mais un soir il me dit : « Payez-moi ma nouvelle !
Notre vierge est debout, mais plus grande et plus belle,
Croyez-en mon rapport, plus belle que devant :
Vous-même à ses côtés aurez l’air d’un enfant. »
Le pauvre avait raison. Là près de la muraille,
Ce jeune plant avait l’an dernier votre taille,
Il a poussé depuis ; voyez votre hauteur :
Vous êtes tous les deux de la même grandeur.

— Un jour d’avril, ainsi, sous le porche de pierre,
Tandis que dans l’église on faisait la prière,
Je parlais à Marie en secret et tout bas ;
Mais elle m’écoutait et ne répondait pas ;
Elle était devant moi distraite et sérieuse.