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Pourtant deux jeunes gens, pareils à ces nageurs
Qui veulent pour autrui périr, hardis plongeurs,
Dans ces flots furieux entrèrent avec joie
Et sortirent vainqueurs, tenant chacun sa proie.
 
L’un de ces combattants était un étranger,
D’où cette rixe ardente et prompte à s’engager.
Ses habits rattachés, il dit au clerc : « Jeune homme,
Je suis un franc marin, c’est Mor-Vran qu’on me nomme.
Si jamais à Carnac vous veniez voir la mer,
De s’ouvrir devant vous mon logis serait fier.
Vous, qui m’avez sauvé de ces buveurs de cidre
Pour qui tout habitant de Vanne est comme une hydre. »
Et, serrant les deux mains de ce brave, il partit.
 
Mais Loïc avait là sa mère qui lui dit :
« N’avez-vous pas de honte ? un clerc, et presque un prêtre,
Avec des batailleurs en plein jour se commettre !
À votre ami Lilèz laissez un tel combat :
À lui c’est son métier, puisqu’il s’en va soldat. »
 
Elle parlait ainsi, cette mère prudente,
Mais fière en elle-même et de son fils contente.
Les héros du Pardon, quels furent-ils alors.
Sinon ceux qu’on a vus si vaillants et si forts ?…

Trois femmes à genoux, dans une lande verte
Le reste de l’année oubliée et déserte,
Sur le bord du ruisseau, trois femmes à genoux
S’occupent en priant à chercher des cailloux ;
Sur le courant béni bien d’autres à la file
Se penchent, remuant les graviers et l’argile,