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Mais, leurs robes de chanvre à la hâte nouées,
Quel ange les conduit, ces femmes dévouées,
Hors d’haleine, apportant les balles que leur main
Fondait, durant la nuit, de leurs cuillers d’étain ?
Courage, ô jeunes gens ! sur ces hautes pelouses
Voici, derrière vous, vos futures épouses !
Vos mères, les voici debout à vos côtés !
Le pied sur votre sol, enfin, vous combattez !

Ô reine des Bretons, Liberté douce et fière,
As-tu donc sous le ciel une double bannière ?
En ces temps orageux j’aurais suivi tes pas
Où Cambronne mourait et ne se rendait pas :
Dans ces clercs, cependant, ton image est vivante ;
En chantant leurs combats, Liberté, je te chante !
Ils n’avaient plus qu’un choix, ces fils de paysans :
Ou prêtres ou soldats, — ils se sont faits chouans ;
Et leur pays les voit tombant sur les bruyères,
Sans grades, tous égaux, tous chrétiens et tous frères…
Hymnes médiateurs, éclatez, nobles chants !
Vanne aussi m’a nourri, mon nom est sur ses bancs :
J’ai nagé dans son port et chassé dans ses îles.
J’ai vu les vieux débris de ses guerres civiles,
Puis je connais le cloître où le moine Abeilard
Vers la libre pensée élevait son regard.
Planez sur les deux camps, à voix médiatrices !
Baume des vers, couvrez toutes les cicatrices !
Ces enfants, accablés du poids de leurs fusils.
Ils partirent trois cents, combien reviendront-ils ?
Toujours une fumée entoure la colline.
Voile où la mort se cache et lâchement butine.