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Il inventa les arts, il bâtit la cité,
Il s’imposa des lois, filles de l’équité.
Si l’injuste est plus fort, brisant toutes ses chaînes.
Sur les rocs nuageux ombragés par les chênes.
Déesse, tu conduis tes chers indépendants ;
Le fusil sur l’épaule et le poignard aux dents,
Pour leur Dieu, leur foyer, pour leurs landes natales,
Ils mourront, ils tûront, rendant balles pour balles,
Et si la terre manque à leur pied libre et fier.
Solitude sans borne, il leur reste la mer,
Leurs flottantes maisons que recouvrent les voiles ;
Aux murmures des vents, aux lueurs des étoiles,
Là, tu suivras encor tes croyants, tes héros :
Dans l’orage le fort sait trouver le repos.

II


En ce temps, Liberté, tu désertais nos villes
Toutes rouges de sang ; sous les bois, dans les îles,
Les derniers Girondins, échappés de prison,
Se cachaient ; Condorcet avait bu le poison !
Un d’eux, errant au fond de l’extrême Armorique,
Arriva sur le seuil d’une chapelle antique ;
Mais il s’enfuit, troublé par des chants dissolus :
L’homme n’a plus d’asile où Dieu n’habite plus.
Au tomber de la nuit, la mer tranquille et verte,
Devant ses pas lassés la mer était ouverte ;
Seul, debout sur la grève, il rêvait à son sort,
Quand des rochers voisins un prêtre, un vieillard sort ;