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Il comprit, et, lançant l’agile lévrier,
Le galant ce jour-là ne courut qu’un gibier.
Puis arriva Flammik : battant chaque feuillage,
Cherchant des nids, il vint ainsi jusqu’au village.
« Eh bien ! cherchez plus loin, mon bel ami, cherchez !
Ici, depuis longtemps, les nids sont dénichés. »
Sans un geste, un regard, sans quitter son ouvrage,
Elle savait jeter le mot qui décourage.

Mais le soleil baissait, et, sous l’astre penchant,
La fontaine, miroir qu’enflamme le couchant,
Brillait ; le saint du lieu, majestueux et riche,
Le saint resplendissait tout doré dans sa niche.
Lors, sur la belle source inclinant son beau front,
Et pensive, la veuve en regarda le fond :
Là scintillaient aussi, comme un jeu de féerie,
Des fragments bigarrés de rouge poterie.
Elle-même naguère en fit don à ses morts.
Car les Esprits, sitôt qu’ils ont quitté leurs corps,
S’en viennent près des eaux, ces mornes purgatoires,
Errer et se laver des fautes les plus noires.
Ils sont tristes. Plaignons, nous disent les anciens,
Plaignons les trépassés ! que chacun songe aux siens !
Lorsque son vieil époux mourut, la jeune femme
Sema donc ces fragments pour réjouir son âme.

Toutefois, par degrés quittant ce souvenir.
Vivante, elle tourna son cœur vers l’avenir.
 
Une épingle attachait le bord de son corsage
(Autre croyance antique, infaillible présage) :
« Si l’épingle descend au fond sans dévier,