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— Commère ! ah ! je pressens un concert de merveilles !
De grâce, poursuivez, car je suis tout oreilles.

— La mère de l’enfant, à peine il faisait jour,
Entre au manoir : « Nola, mon orgueil, mon amour !
« Ma fille, embrassez-moi, vous n’êtes plus servante,
« Mais une femme libre et qu’il faudra qu’on vante.
« Un richard ignoré se fait votre soutien,
« Marc, en vous épousant, vous donne tout son bien.
« Le maître jardinier, heurtant à ma chaumière,
« Cette nuit m’a conté l’histoire tout entière,
« Oui, vous êtes, Nola, ma joie et mon honneur,
« Car votre vertu seule a fait votre bonheur… »
Puis, comme elle restait sans répondre, la mère
Dit : « Me laisserez-vous mourir dans la misère ? »
Elle n’hésita plus. Dès lors, ce fut chez nous,
Voisine, un caquetage à rendre les gens fous.
Avec pompe à l’église enfin fut célébrée
Cette union, hélas ! de bien peu de durée :
Mais quel jeune prendra le lit du vieil époux ?
On nomme cent rivaux, on nomme cent jaloux »

Une heure ainsi jasa la commère Catelle ;
Et je passe, lecteur, les dit-il, les dit-elle.
Et les digressions sur chaque prétendant ;
Puis les gestes, les cris, les soupirs ; cependant
Ici dut s’arrêter cette maîtresse langue,
Car l’autre, qui brûlait d’entamer sa harangue,
S’écria… mais, bon Dieu ! plutôt qu’un tel discours,
D’un fleuve débordé suivre, suivre le cours ! —