Page:Brizeux - Œuvres, Histoires poétiques III-VII, Lemerre.djvu/181

Cette page a été validée par deux contributeurs.

 
— Eh bien, ne quittez pas ses déserts embaumés.
Sage, contentez-vous du blé que nos mains sèment :
Oh ! demeurez toujours près de ceux qui vous aiment,
Et près de ceux que vous aimez ! »

XVII

DERNIÈRE DEMEURE

À vous, bardes sacrés, ô chanteurs radieux !
Un nid voisin de l’aigle, un tombeau près des cieux ;
À vous les hauts sommets, à moi l’humble vallée,
Et, comme fut ma vie, une tombe voilée.
Tel est mon dernier vœu. Tout près du Pont-Kerlô,
Dans un bois qui pour maître avait le vieil Elô,
Couché parmi les buis, au murmure des sources,
Je reposerais bien, je crois, après mes courses.
Les soirs d’été, c’est là qu’aux branches des buissons
Nous allions, gais enfants, pendre nos hameçons,
Cueillir l’airelle noire et, dans le mois des neiges.
Tout le long des taillis tendre aux oiseaux des pièges.
Pourtant, mon corps venu, si le nouveau curé
Me refuse une tombe en ce bois ignoré,
Qu’il me donne, du moins, ma place au cimetière,
Parmi les rangs bénits de la paroisse entière,
Avec Albin, Daniel, et tous ceux du canton
Dont j’ai dit bien des fois le village et le nom :
Une autre aussi viendra vers cette couche sombre,
Et, réunis enfin, nous dormirons dans l’ombre.