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Les Destinées


Cétait une âme juste. — En arrivant au monde,
Dans un riche manoir l’enfant à tête blonde
Vit le jour et grandit, fleur parmi d’autres fleurs :
L’âge faible passa préservé des douleurs ;
Compagnon de ses jeux, un enfant du village
Seul parfois l’étonnait par son maigre visage :
À ses goûts cet enfant si vite était rangé,
Et si vite le pain qu’on oubliait mangé !
Mais lui, sans pénétrer cette souffrance amère,
Mollement s’endormait embrassé par sa mère.
Bientôt (nouvelle joie !) avec la puberté
Vint le premier essor de toute liberté ;
Sur les chevaux légers, au son des cors de chasse,
Le blond patricien essaya son audace ;
Ainsi, croissant toujours, à vingt ans le voilà
Dans Paris où la muse à lui se dévoila.
Ses chants, à peine nés, partout on les proclame :
Seuls ils vont à l’esprit et seuls ils touchent l’âme ;
Au milieu des banquets il est salué roi.
Mais un chantre inconnu, jeune homme, est près de toi,