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Tu serais un bel ange ; et comme au baptistère
Sur la porte de bronze on voit un séraphin
Qui chante vers le ciel son cantique sans fin,
Ainsi tu chanterais rayonnante de gloire.
Et tu tiendrais en main un long archet d’ivoire.
 
« Las ! disait dans son cœur le prince de Léon,
Que ne suis-je saint Luc ou que ne suis-je Orphée !
Comment poindre le ciel avec notre limon,
Et comment chanter une fée ? »

Dans un enclos voisin du grand palais Pitti,
Vous, mon âme, restez quand je serai parti ;
Ou qu’après moi, du moins, une part de vous-même,
Mon âme, reste encor dans cet enclos que j’aime !
Errez, errez sans fin à l’ombre des grands murs,
Passez devant la grille et parmi les blés mûrs ;
Le soir, n’oubliez pas les vaches dans l’étable.
Vous y boirez du lait qui fume sur la table ;
Et parfois vous viendrez vers mon pale horizon
Me dire ce qu’on fait dans la chère maison.
 
Globes, ciel éthéré, régions sans égales
Où plane comme un dieu l’héritier d’Occismor,
Durement retombé des sphères idéales,
Pourra-t-il respirer encor ?

Le long du Mugnoné, de Florence à Fiésole
je m’en vais, atiachant mes yeux sur chaque saule ;
Je passe le torrent, sur son lit desséché
Je m’incline, et sans voir je reste ainsi penché ;
J’aspire autour de moi les parfums de la route ;