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À un Religieux


 
Tu n’as point redouté le cloître solitaire,
Le silence, et la règle invariable, austère,
Les macérations de la chair et du cœur,
Et quatre fois par jour les stations au chœur.
Tu prononças tes vœux ferme et tout d’une haleine ;
Et, lorsqu’on te vêtit de la robe de laine,
Qu’on rasa tes cheveux, sur ce front tonsuré
Sans pâlir tu jetas l’habillement sacré.
Aujourd’hui doux et calme au milieu de tes frères,
Ensemble vous passez les heures en prières.
Et vous errez, le soir, à l’ombre du jardin,
Comme ces saints reclus que peignait Pérugin,
Qui marchaient deux à deux entourés d’auréoles,
Et la paix de leur cœur coulant dans leurs paroles.
 
Si jeune, avec un cœur plein de joie et de feu,
D’ordinaire à ce monde on ne dit point adieu ;
On lutte plus longtemps ; sous une robe noire
On a peur d’étouffer tout amour, toute gloire ;
On se confie au temps, à ses amis, au sort,
Quelquefois en secret on espère en la mort :