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À ma Mère en Italie


Elle voulut partir, malgré le poids des ans,
Pour suivre en Italie un de ses chers enfants,
Cœur d’or, solide esprit, mais faible créature,
Et que l’art confiait aux mains de la nature.
En vain lui disait-on : « C’est trop loin. — Non, j’irai.
S’il part d’ici sans moi, seule ici, j’en mourrai.
Est-ce trop de nous deux (une mère, une femme).
Pour bien soigner son corps, pour réjouir son âme ?
Et puis, vous le savez, j’ai là mon autre fils,
Que le soleil retient aussi dans ce pays,
Le premier-né d’eux tous, ma ressemblance même,
Pauvre chanteur errant qui me fuit, mais qui m’aime.
Ah ! tout mon cœur se trouble !… Allons, pas de refus !
Je me fais vieille, hélas ! ne le verrai-je plus ? »
Et tu suivis ton cœur, qui seul te persuade,
Pour voir ton fils absent et voir ton fils malade.

Oh ! dans l’hôtel de Gêne et dans cet escalier,
duand tu me rencontras au détour du palier,
Oh ! comme tu m’ouvris tes bras, et quelles larmes
Sortirent de nos yeux toutes pleines de charmes,