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Le Chant de la Coupe


Dans ma chaumière, un soir, prés d’un grand feu de lande,
Je rêvais ; des amis faisaient cercle ; et voilà
Que, soulevant ma tasse, un des chefs de la bande
Ainsi, pour dissiper mes rêves, me parla :

« Aime ton humble coupe. Elle est de buis, qu’importe !
Le buis solide et dur te sied, chanteur breton ;
Et sur le pied d’étain qui l’orne et la supporte,
Dans un double idiome on peut lire ton nom.

« Vois, nul encor n’a bu dans la coupe celtique.
Toi-même la creusas de tes pieuses mains.
Evoquant, évoquant les Esprits d’Armorique
Depuis prés de mille ans couchés sous les dôl-mens.

« Tous se sont éveillés ! Mélodieuse troupe,
Ils sont venus à toi comme des échansons ;
Et voici qu’enivrés aux vapeurs de ta coupe,
Sur les bords de Cornouaille ils versent tes chansons.