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Toute heure en ce lointain rit et nous semble aisée,
Notre jeune saison pourtant mal exposée
Reçut la brume froide et la froide rosée.

Ô Jeunesse jetée au coin d’un carrefour,
Pour trouver ton chemin, errant tout alentour,
Et souvent par ton choix perdue, et sans retour !

Mille sentiers mauvais pour une bonne voie !
Et nul pour avertir celui qui se fourvoie,
En disant : C’est par là que le Seigneur t’envoie.

Pour lors, « Fais ce que dois, advienne que pourra ! »
Et va par le sentier que ton cœur te montra :
Du plus fort bien souvent tout le savoir est là.

Non, non, je ne peux pas troubler tes jours de fête,
Blanchir avant le temps l’or d’une jeune tête,
Mais je dis : Sois prudent et préviens la tempête !
 
Une force sacrée est déposée en toi,
Ne jette pas au vent ce qu’envîrait un roi ;
Augmente ton dépôt tel qu’un croyant sa foi.

Joyeux comme ton âge, et gai comme tes frères,
Suis d’un pas mesuré leurs courses téméraires,
À de libres élans joins des pensers austères.

Tout aux instincts naïfs, ne crains pas de savoir.
L’impassible science est pour l’homme un devoir.
En face du danger il faut périr ou voir.