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Devant vous les lutteurs se sauvent de Cornouailles,
Vous coupez les cheveux des jeunes gens de Scaer,
Et, pasteurs des esprits, vous n’avez pour vos ouailles
Qu’un langage incorrect et d’un mélange amer.

Niveleurs imprudents ! la vieille langue éteinte,
Tous les vices nouveaux chez vous arriveront,
Et si vous élevez sur l’autel la croix sainte,
Nul au pied de la croix n’inclinera son front.
 
Dieu vous donna le soin de la vivante chaîne,
Il en est temps, sondez ses mystiques anneaux,
Affermissez le roc où doit grandir le chêne ;
Entretenez la digue où s’amassent les eaux. —

Et toi dont le premier j’ai chanté les bruyères,
Qui vivras dans mes vers avec tes chastes mœurs,
Pardonne, ô mon pays, et pardonne à mes frères
Si nous jetons de loin ces sinistres clameurs :
 
Tout amour est craintif ! Puis, une telle crise
Semble bouleverser tes flancs près de s’ouvrir !
Mais, fidèle à toi-même et gardant ta devise,
Bretagne, tu diras encor : « Plutôt mourir ! »