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Mais, prêtres, est-il vrai ? Dans ces classes sans nombre
Notre langage à nous ne résonne jamais ;
Nos vieux saints ont pleuré dans leur chapelle sombre :
« Las ! dit Hoël, les fils des guerriers que j’aimais ! »

Donc, à notre retour, du milieu de la lande
Le joyeux ali-ké ne s’élèvera plus,
Les pâtres traîneront quelque chanson normande,
Et nous serons pour eux comme des inconnus.

Oh ! l’ardent rossignol, le linot, la mésange,
Pour louer le Seigneur n’ont pas la même voix :
Dans la création tout s’unit, mais tout change,
Et la variété c’est une de ses lois.
 
Le niveau, c’est la mort ! — Ô prêtres d’Armorique,
Si calmes, mais si forts sous vos surplis de lin,
Anne laissa tomber le joug sur la Celtique :
Sauvez du moins, sauvez la harpe de Merlin !

Par dela le détroit, chez nos frères de Galles,
On n’a point oublié la bannière d’azur ;
Le barde vénéré siège encor dans les salles,
Et des livres fervents prônent le grand Arthur !
 
Prêtres, je vous le dis : vous, nos maîtres, nos sages,
Refroidissant les cœurs par trop d’austérités,
Vous avez aboli les antiques usages,
Et le peuple ennuyé rêve les nouveautés.