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M. HENRI DE RÉGNIER


Les temps ont marché. Si l’on eût remis à M. Villemain, alors qu’il était grand maître de notre Université, les œuvres de M. Henri de Régnier, il les eût rejetées avec mépris et se fût bien gardé de conférer la croix d’honneur au jeune écrivain. Aujourd’hui, nous avons le goût plus large ; nous admettons qu’un poète s’affranchisse des règles classiques et cherche en dehors des traditions une voie nouvelle. M. Henri de Régnier incarne, avec distinction, les aspirations, les inquiétudes des hommes de son âge ; l’école qu’il a contribué à fonder cherche à s’élever sur les ruines du romantisme et du Parnasse. Et si, jusqu’à présent, ses destinées semblent indécises, on ne peut nier qu’elle ne réponde à un mouvement d’idées très sérieux. Depuis un demi-siècle, la poésie n’a cessé d’évoluer. De 1830 au début du second Empire, elle fut sentimentale et grandiloquente. Elle s’attachait à peindre la passion sous une