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Richepin s’évertua à jouer les Schaunard ; ce fut un Schaunard asiatique, truculent et somptueux. Il oubliait de payer son terme, il déjeunait dans les crémeries ; mais il portait en épingle certain rubis qui avait appartenu, disait-il, au Grand Mogol et qui se cassa en tombant sur le marbre d’une cheminée. Il était beau et aimé des femmes. Il était heureux !...

Examinons maintenant la plus récente photographie. Le poète est assis à une table surchargée de paperasses, dans une pièce remplie de livres et d’objets d’art. Un feu clair flambe dans l’âtre et colore de ses reflets des landiers en fer forgé et des chandeliers de cuivre ; de vieux vitraux laissent passer une lumière adoucie, qui vient s’éteindre sur des tapis d’Orient. Ce milieu respire le confort, la paix domestique, un luxe de bon aloi. Le maître de céans est bien le même personnage que nous avons vu tout à l’heure ; il porte un manteau écarlate que ferme une agrafe d’or ; et son mollet se dessine ferme et musclé, sous la trame élastique du bas de soie... Cependant le front est dégarni, quelques fils blancs apparaissent dans la chevelure. Le temps a touché de son aile le chansonnier des gueux, et en l’effleurant, il l'a calmé, assagi. Jean Richepin peut dire, comme le charbonnier de la légende : Je suis ici chez moi.

Et, en effet, ce « home » lui appartient ; et non seulement le cabinet de travail, mais la maison, et