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La grande bataille gastronomique a toujours lieu durant les jours gras.

Alors se termine l’année gastronomique.

Après ces grands travaux, un peu de diète est nécessaire : ce sont les vacances de l’estomac.

Productions de février. — Elles sont les mêmes qu’en janvier, avec quelques primeurs de plus. La viande de boucherie est toujours parfaite.

Le gibier est moins abondant, mais il est exquis. — La dodue et blanche gélinotte est à son point ; celle que l’on tue dans les environs de Bains, en Vosges, a un rare mérite. Je ne puis quitter les Vosges sans donner une larme au rouge-gorge, déclaré oiseau sédentaire par messieurs du Muséum d’histoire naturelle, et proscrit, pour cela, de nos tables. Ces professeurs n’en ont jamais mangé. Certes, sans cela...


MARS.

Le repos n’est pas plus le fait d’un estomac exercé que d’un cœur conquérant. En mars, les fatigues du carnaval ne sont plus qu’un souvenir, et Châteaubriand disait à madame Récamier que la plus belle moitié de la vie se compose de souvenirs. Il faut saintement recommencer à jouir des riches dons de l’amour gastronomique.

Le carême nous est resté, entre toutes nos traditions, pour faire historiquement plaisir à saint Mathieu, à saint Marc et au pape Télesphore, sans compter les adorateurs du dieu Poisson.

Nul regard de tristesse à jeter sur le carême. Un paysan, après avoir été domestique chez son seigneur, disait : « Je ne puis faire maigre, c’est trop cher ; il faut du gibier d’eau, des truites de Genève, des carpes du Rhin, des fruits et des légumes de primeur, du vin de Champagne et des truffes. » Notre homme avait raison ;