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IX
INTRODUCTION.

plus aimable et le plus savant des maîtres d’hôtel français.

La révolution de Juillet tua le pauvre Gastronome, comme si c’eût été un des Suisses de la Garde royale. La cuisine, hélas ! périt elle-même dans ce bouleversement politique. Par bonheur, la cuisine est immortelle, ni plus ni moins que le phénix, et elle sortit bientôt des cendres de fourneaux éteints, pour briller d’une nouvelle et glorieuse jeunesse. Elle n’est pas morte depuis, Dieu merci ! et ne mourra pas tant qu’il y aura des gens de goût en France.

Je vois donc, mon cher ami, avec un juste sentiment d’orgueil, renaître le Gastronome dans votre Salle à Manger. Le comte de Cussy et Carême sont allés rejoindre le fameux Laguipière, dont ils ne prononçaient le nom qu’en s’inclinant avec respect. Mais je n’ai pas oublié leurs préceptes culinaires et leurs conseils gastronomiques ; je m’en souviendrai par écrit, à votre intention, et, en attendant, je vous prie d’avoir sans cesse sous les yeux cette belle devise de mon défunt Gastronome, devise empruntée à la Physiologie du Goût de Brillat-Savarin : Les animaux se repaissent, l’homme mange, l’homme d’esprit seul sait manger.

Soyons hommes d’esprit, s’il est possible, et sachons manger jusqu’à cent ans et au delà ; on est bon à quelque chose en ce monde, tant qu’on peut tenir la fourchette et la plume. Je fais des vœux pour que tous les amis de la bonne chère prennent sous leurs auspices l’amphitryon et la Salle à Manger.

À vous.

P.-L. Jacob, bibliophile.


P. S. La collection du Gastronome, qui se compose de 220 à 250 numéros, de 8 pages chacun, petit in-folio oblong en hauteur (de février 1830 à mai ou juin 1832), est de la plus grande rareté. Je n’en pas vu d’autre exemplaire complet que celui de la Bibliothèque impériale. Il