Page:Brifaut - Œuvres, t. 6, éd. Rives et Bignan, 1858.djvu/14

Cette page n’a pas encore été corrigée

Peut-être il n’attend qu’elle. Essayez aujourd’hui,
Demain, encor demain ; et vous verrez peut-être
Aux nobles sentiments ce coupable renaître :
Vous lui ferez aimer ce qu’il a combattu ;
Vous aurez reconquis une âme à la vertu.
Et que la vôtre alors reposera contente !
Le prix ne vaut-il pas que votre espoir le tente ?
Rétabli parmi nous, grâce à vos heureux soins,
C’est un juste de plus, c’est un méchant de moins.
Au grand corps des humains son remords le rallie,
Il y reprend sa tâche, et sa tâche est remplie.
Père, époux, sans murmure il porte à vos côtés
Le fardeau des devoirs qu’il avait rejetés.
Il abjure sa vie : une autre recommence.
Eclairé par sa chute, instruit par sa démence,
Il veille sur ses fils qui ne le quittent pas ;
Des piéges qu’il connaît il détourne leurs pas :
Et, sage fondateur, sous l’oeil de son génie,
Voyant croître en vertu sa jeune colonie,
Tranquille au milieu d’elle, il fermera les yeux
En citoyen du monde, en aspirant des cieux.
De votre humanité, mortels, voilà l’ouvrage.
— Brillante fiction, que repousse le sage !
L’homme ne change point. — Tout change autour de lui.
— Ce qu’il a fait hier, il le fait aujourd’hui.
— Nous voyons le contraire. — Il n’est qu’une maxime :
Le bien conduit au bien, le crime mène au crime.
Mais si je vous prouvais qu’il n’est point criminel,
Celui que vous frappez d’un arrêt solennel ;
Qu’il a suivi vos pas, adopté vos systèmes,
Que les leçons du meurtre, il les doit à vous-mêmes ;
Que tout ce sang versé fut répandu par vous ?
Vous reculez d’horreur ; vous me criez : Qui ! nous,
Nous de ses attentats nous serions responsables !
— Mortels ! j’ai dit bien plus : vous en êtes coupables.