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LA VIE DE FAMILLE

ferme de la même manière les fenêtres du premier qui donnent sur la rue. Au second, les fenêtres ont des barreaux ou des grilles en fer, et derrière ceux-ci un store que l’on baisse la nuit. Pendant le jour on n’aperçoit pas le store, et les fenêtres grillées ou à barreaux donnent une apparence de prison aux étages les plus rapprochés de la rue. Chez les personnes aisées, les grilles des fenêtres sont ornées, et l’on voit souvent derrière elles de jolies femmes se berçant dans des balançoires et s’éventant avec leurs éventails. Il n’y a pas de vitres. Cette façon de construire les maisons et les chambres permet à l’air de circuler librement partout, et celui de Cuba est sûr d’être le bienvenu ; mais il apporte beaucoup de poussière, empêchement véritable à la propreté et au bien-être.

En se promenant dans la ville, — et je m’y suis beaucoup promenée durant ces derniers soirs, — on voit par les arcades et les passages à demi obscurs, dans l’intérieur des maisons et des ménages, des figures paraître et disparaître sous les portiques ornés de peintures à fresques représentant des fruits et des fleurs. Mais on voit tout cela dans le demi-jour ; c’est une publicité mystérieuse au fond. Il y a dans les constructions de cette ville un grand mélange de régularité et d’irrégularité, de choses vieilles et jeunes ou en ruines. À côté de la voûte de l’arcade et de la muraille peinte artistement se trouvera un mur à moitié croulant, dont les peintures sont presque effacées ou tombées avec le mortier. On ne répare point le vieux mur, ni la vieille peinture. Ceci, les physionomies et les manières de la population de couleur, les volantes qui courent, vont et viennent silencieusement dans les rues, donnent à la Havane une animation fort attrayante et romantique, sans ressemblance aucune avec les autres villes que