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LA VIE DE FAMILLE

prêtres en grandes chapes et grands chapeaux singuliers vont à pied. La plupart des gens du peuple que l’on voit dans les rues se compose de nègres et de mulâtres ; dans les boutiques mêmes, surtout celles de cigares, ce sont des mulâtres qui les tiennent ; partout on voit fumer des cigares, et principalement des cigarettes. Il paraît que la population de couleur s’enivre de fumée de tabac. Je vois souvent des nègres et des mulâtres assis devant les boutiques, dormant à demi, le cigare à la bouche. Le calashero, quand il attend devant une maison, descend de cheval, s’assied à côté de sa voiture, fume, et s’assoupit au soleil. Mais que devient toute cette fumée ? On ne la voit nulle part, elle est sans doute absorbée par l’air de la mer.

Il faut achever ma journée. Après m’être promenée ou assise sur la terrasse supérieure jusqu’à minuit pour jouir de l’air qui me paraît avoir ici une influence salutaire et bienfaisante ; je rentre dans ma chambre et me couche sur un lit de camp sans literie, mais où je repose parfaitement et m’endors au souffle du vent qui passe par le grillage de la porte et des fenêtres sans vitres ni volets.

Ma chambre a une sortie sur le toit, ce qui m’est fort agréable, car je puis ainsi prendre l’air, et n’ai qu’un petit escalier à monter pour me trouver sur la terrasse supérieure. C’est le principal lieu de réunion de famille à Cuba, quand on veut jouir, le soir, de la brise.

Je veux maintenant te parler des personnes qui me témoignent ici infiniment de bonté : c’est d’abord la famille Tolmé ; sa maison de commerce est des plus estimées de la Havane, et un jeune couple, M. et madame Schaffenberg, gendre et fille de M. et madame Tolmé. Le père de famille est Anglais ; il a été l’agent, à Cuba, de la maison Roth-