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LA VIE DE FAMILLE

ment prouve que son propriétaire n’était pas dévoué outre mesure à la simplicité républicaine. Un salon pavé en mosaïque est véritablement splendide ; mais le bien-être d’un intérieur lumineux et amical m’a manqué partout.

Jefferson, ami de Th. Payne, était, comme celui-ci, un athée, et ses mœurs annoncent une moralité peu rigide. Ses portraits et ses bustes expriment une vie énergique, mais inquiète ; on y voit une nature opiniâtre qui lutte et que la contradiction pousse facilement aux extrémités ; du reste, la physionomie est animée, gaie, communicative. Le front est plus large que haut, la noblesse et le calme de Washington lui manquent. Jefferson aimait son peuple et l’a dirigé dans ses efforts pour arriver au grand acte de la « Déclaration de l’indépendance, » production de l’esprit du temps plus encore que du cerveau et de la plume de son auteur.

En me promenant dans le parc j’ai remarqué ce parfum infiniment suave que j’ai souvent senti en Amérique, on le dit produit par la fleur de la vigne sauvage. Elle croît ici en abondance, comme dans tous les autres États de l’Amérique du Nord, et c’est ici mieux que partout ailleurs que se réalisera cette prophétie annonçant que « chacun sera assis en paix à l’ombre de sa vigne et de son figuier sans qu’on puisse l’en empêcher. »

Plus avant dans la soirée, j’ai vu une grande partie des professeurs de l’université et de leurs femmes, parmi lesquelles il y en a de fort bien. Le président, M. Harrison, à des yeux beaux et profonds, des manières agréables et posées. Cette université est surtout estimée pour la solidité de l’instruction qu’elle donne, et la sévérité de ses exigences à l’égard des étudiants. Le jeune homme qui a son diplôme de science daté d’ici est certain qu’on l’emploiera