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LA VIE DE FAMILLE

l’influence des femmes dans leur foyer et sur l’éducation des enfants est loin encore, généralement parlant, d’être ce qu’elle devrait être, ou de ce qu’il faudrait qu’elle fût dans ce pays, où les lois de la conscience auraient besoin d’être renforcées dix fois plus que les lois extérieures, trop faibles pour comprimer la volonté et les caprices de l’individu. La femme américaine se marie jeune, à peine sortie de l’enfance ; elle a des enfants de bonne heure et montre souvent son amour maternel — en les gâtant, en favorisant tous leurs caprices et leurs désirs. Elle a été gâtée de même dans la maison paternelle, et s’en remet, pour la discipline, la sévérité, à la pension, où l’enfant est envoyé fort jeune. L’école fait ce qu’elle peut, donne une teinture d’instruction et de formes à l’homme extérieur, et laisse l’intérieur à peu près dans le même état qu’à la sortie de la maison maternelle.

De là résulte, — surtout dans les États à esclaves, ce manque de retenue dans le caractère et les actions, ce manque d’une morale plus sévère, de délicatesse, de conscience, qu’on reproche, non sans raison, au jeune homme américain, et les désordres qui en sont la suite pour la famille et la société[1]. Les femmes énergiques qui élèvent les citoyens avec sévérité et amour, — ces femmes que Lycurgue voulait créer pour que sa république devint grande et forte, — n’existent point ici.

Mais ce type antique de la force n’est pas le seul nécessaire ; le Nouveau-Monde en connaît un autre. S’il se géné-

  1. Je dois dire cependant, et quoique ces désordres fassent ici beaucoup de bruit, qu’ils ne sont pas supérieurs à ceux qui se passent en silence et en bien plus grand nombre dans les États européens.
    (Note de l’Auteur.)