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LA VIE DE FAMILLE

des verges en roseaux à la main pour contenir les agneaux noirs ; ceux-ci reculaient en masse, avec une expression irrécusable de crainte et de terreur, devant ces sorcières, en les voyant avancer et agiter leurs verges. Dans des plantations moins considérables, où les enfants étaient en plus petit nombre et leurs gardiennes plus douces, la scène était moins blessante, mais elle rappelait toujours un troupeau de moutons nés seulement pour servir de nourriture. Et cependant il s’agit de créatures humaines avec une âme immortelle. On amène les enfants le matin ; ils sont bien nourris, à déjeuner, à dîner, le soir, et dans l’intervalle menacés, battus, puis renvoyés chez eux. Et ceci continue jusqu’au moment où ils peuvent travailler et être placés sous le fouet.

Serait-ce trop demander de la femme, de la fille, de la sœur du propriétaire d’esclaves, trop demander à des femmes chrétiennes, que de les inviter à se rapprocher une ou deux fois par semaine de ces bandes d’enfants sans défense et mal soignés, de leur parler du Père qui est dans les cieux, de leur apprendre à réciter l’Oraison dominicale ? Les jeunes personnes du Sud occuperaient leur temps d’une manière plus belle et plus digne, si elles le consacraient à cette œuvre, au lieu de passer leurs journées dans la paresse, à faire des visites, ou dans des distractions futiles, comme le font un si grand nombre d’entre elles.

Il est fort habituel en Europe de mettre sur le compte des États-Unis l’institution de l’esclavage ; on oublie ordinairement que si une partie de ces États a des esclaves, c’est l’Angleterre qui les y a obligés. Plusieurs des colonies, surtout la Virginie et la Géorgie, protestèrent, dans le commencement, de la manière la plus énergique, contre l’introduction de l’esclavage. Ce fut en vain. L’Angleterre