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LA VIE DE FAMILLE

Je regrette de n’avoir pas fait plus tôt la connaissance d’Alfred Sauval ; car j’aurais appris par lui, sur la Havane, beaucoup de choses auxquelles je suis obligée de renoncer, faute de temps.

Bien des améliorations paraissent avoir eu lieu à Cuba durant ces dernières années, surtout en ce qui concerne la police et la sécurité individuelle à la Havane et dans toute l’île. Plusieurs personnes m’ont affirmé qu’on entendait souvent, il y a quelques années, le soir dans les rues, crier « à l’assassin ; » mais on n’osait pas aller du côté d’où partait ce cri, parce que c’était parfois une ruse ; et ceux qui s’y laissaient prendre s’exposaient à se faire tuer eux-mêmes. Si un individu en voyait un autre étendu à terre, assassiné ou mourant, il n’osait pas aller à son aide, dans la crainte, si le blessé venait à mourir sans que plusieurs témoins pussent affirmer l’innocence de celui qui l’avait secouru, d’être accusé de l’assassinat et de s’attirer un procès sans fin. On attribue aux réformes du gouverneur Tacon la sécurité et la position meilleure dont on jouit actuellement. C’était un homme sévère, utile au public ; mais son esprit despotique l’a fait haïr de bien des gens.

Les procès et les hommes de loi sont ici en grande prospérité. La violence elles tracasseries de la loi, des tribunaux envers les particuliers, la difficulté qu’on éprouve à se faire rendre justice, à moins de l’acheter par de grands sacrifices, sont inouïs. Pour remédier à ce mal, il faudrait une réforme totale des tribunaux et de l’administration.

Pendant mes promenades à la Havane, j’ai toujours regardé avec plaisir la population nègre, car elle me paraît plus libre et plus heureuse qu’aux États-Unis ; on voit souvent ici des nègres et des mulâtres se livrer au commerce ; leurs femmes sont très-bien, et même habillées avec