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DANS LE NOUVEAU-MONDE.


La Havane, 5 mai.

Non, la religion n’est pas entièrement morte à Cuba ; elle vit encore dans quelques belles fondations de charité en faveur des orphelins et des malades. Elle y est plus vivante que dans les États-Unis sous un rapport, c’est-à-dire qu’elle reçoit aussi bien un nègre qu’un blanc ; ils sont sur la même ligne dans les hôpitaux et les établissements de bienfaisance. Je l’ai vu aujourd’hui, en parcourant avec Alfred Sauval le vaste hôpital de Saint-Lazare, dont il est l’intendant. Ce grand établissement est destiné aux infortunés attaqués de maladies incurables inhérentes aux tropiques, et surtout aux Africains ; — l’éléphantiasis lépreuse, dans laquelle les pieds et les jambes se gonflent, prennent des dimensions monstrueuses, — et la maladie de Saint-Antoine, qui contracte les mains, les pieds sans douleur ni plaie, et les réduit à rien. Les meilleures dispositions sont prises ici en faveur de ces malheureux.

Cette grande construction, bâtie comme un vaste bohen carré, avec grille servant de porte, est sur le bord de la mer, dont les vagues mugissantes baignent les rochers sur lesquels on l’a élevée, et entourent la maison des malades de leur brise pleine de vie et de santé. Il y a, dans les cours spacieuses, de jolies plantations d’oléandres, maintenant en pleine floraison, et qui embaument l’air. Ces belles plantations sont dues au jeune intendant. Tout malheureux, noir ou blanc, attaqué par l’une des maladies incurables que je viens de nommer, trouve ici une demeure particulière, séparée, commode. Parmi les personnes que j’ai visitées, était un vieux nègre, souffrant, depuis sa jeunesse, de la maladie de Saint-Antoine. Ses mains n’a-