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LA VIE DE FAMILLE

planteurs. La nature est une si bonne mère, et le Créateur de la nature un si bon père, que la nourriture du meilleur goût et la plus salutaire se trouve dans les pays accessibles à chacun. Qu’avons-nous de mieux et de plus sain à la longue dans nos contrées que la pomme de terre, le hareng, le pain, le lait, la bouillie de farine de seigle et l’eau ? L’eau pure de source, la plus excellente de toutes les boissons naturelles, ne nous est-elle pas donnée pour rien !

Il faut te dire maintenant quelques mots de la dernière danse des nègres que j’ai vue à Cuba, aujourd’hui dans l’après-midi, sous un grand amandier touffu un peu en avant du bohen ; celui-ci n’est pas, à Concordia, un mur de forteresse avec portes et barrières, mais un bâtiment dégagé et ressemblant un peu à nos fermes.

Cette danse avait le même caractère que les autres. Un cercle d’individus chantant, répétant d’une manière monotone, sans harmonie, mais avec une animation rhythmique, les paroles et le ton donnés par un jeune nègre. Au centre du cercle, un ou deux couples dansant, sautant, faisant des courbettes, l’homme avec vivacité, la femme modestement ; cette danse était une improvisation monotone continue. Ici, une foule de petits enfants étaient dans le cercle, et parmi eux se trouvait la bonne « dame blanche. »

Je demandai de nouveau quelle pouvait être la signification des paroles qu’on chantait pour faire danser ; on me répondit qu’elles n’en avaient aucune et ne méritaient pas la peine d’en parler. C’est peut-être vrai, mais je sais par mainte narration et les chants nègres des États à esclaves de l’Amérique qu’il n’en est pas toujours ainsi. Le penchant des noirs à l’improvisation est un trait saillant de leur vie et de leur caractère, il peut devenir l’expression