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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

tes fleurissent dans le jardin, et la volière contient une foule d’oiseaux rares.

Lorsque je me promène au coucher du soleil dans les nombreuses allées du cafetal, avec madame de Carrera, en ayant avec elle des conversations — toujours remplies de vie, — je ne puis m’empêcher d’admirer la beauté et la grâce des jeunes palmiers. Les palmes du cocotier sont ravissantes dans leur jeunesse. L’aisance et la régularité, la loi et la liberté, la majesté et la douceur, révèlent en elles un symbole vivant. Il y a également ici un berceau gigantesque ou allée voûtée de bambous qui aboutit à un magnifique boulingrin de palmiers royaux. Quand je vois le soleil se coucher dans la profondeur de cette voûte d’un vert-clair, quand je vois les branches délicates du bambou former des arcades gothiques aériennes, dont la grâce ne peut se décrire, sur les nuages rouge-clair et dorés du ciel du soir, — je sens alors, avec un mélange de mélancolie et de joie, que l’artiste, découragé, doit laisser tomber la plume et le pinceau, et au lieu de lever les mains pour imiter, les joindre pour se borner à adorer l’artiste suprême. Mais il est bon de voir ces tableaux, afin qu’ils ennoblissent et spiritualisent la vie.

Je me lève de bonne heure pour peindre, et vois de ma fenêtre deux grands hybiscus avec fleur rouge-feu autour desquelles tourbillonne un essaim de colibris vert-émeraude ; sur la pelouse, il y a une foule d’autres oiseaux qui m’amusent infiniment. D’abord deux flamants rouge-clair, à hautes jambes, long cou. Pris fort jeunes sur le rivage de la mer, ils sont maintenant apprivoisés et ressemblent un peu pour la forme aux cygnes ; mais ils ont les jambes et le cou beaucoup plus longs, plus minces. Leur tête est petite, leur bec grand et crochu ; ils ont un