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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

je la reçus dans une chambre attenante à la mienne et tout aussi dépourvue de prétentions.

Don Ildephonso siffla les gens de la posada[1], qui accoururent ; il fit signe de la main, et chacun s’envola pour exécuter ses ordres. Miranda a été pour moi un véritable cavalier parfait, infiniment poli de ton et de manières. Il mit sa volante et son calashero à ma disposition pour me conduire chez madame de Carrera, déjeuna avec moi, veilla à tout, et, lorsque je demandai ma note, elle était déjà payée par Miranda. Il était inutile et même inconvenant de protester, je le fis donc d’une manière insignifiante, et remerciai en faisant un compliment sur la courtoisie des Espagnols. Elle est, en vérité, fort grande envers les femmes et les étrangers, et pourrait bien être basée sur une certaine fierté nationale, noble et belle au fond.

Je partis donc dans la volante de don Ildephonso et par un vent chaud tropical qui soulevait des tourbillons de poussière. Je ne vis qu’en passant rapidement à travers ces nuages de poussière rouge-feu les jolis palmiers et les fleurs éclatantes des cafetals qui bordaient la route des deux côtés.

Madame de Carrera n’était pas chez elle, mais au bord de la mer, sur la côte méridionale de l’île, où elle prenait les bains avec ses enfants et petits-enfants ; elle n’avait pu recevoir que ce jour-là ma lettre et celle de son fils. Mais l’intendant de la plantation, Don Félix, homme poli et d’un certain âge, me reçut avec la courtoisie de sa nation, en

  1. Il est généralement d’usage à Cuba de siffler pour appeler les domestiques, et ceux-ci font de même entre eux. Ce son est plutôt un st aigu qu’un sifflement. On l’entend à une assez grande distance.
    (Note de l’Auteur.)