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LA VIE DE FAMILLE

Nous avons quelquefois des visites le soir ; ce sont, soit des Européens établis dans l’île, soit des femmes espagnoles qui jouent et font continuellement du bruit avec leurs éventails. La beauté, la magnificence et le poids des éventails sont des qualités fort recherchées. J’en ai vu qui ont coûté de vingt-cinq à cent dollars. Les plus précieux sont en ivoire et montés en or ; de petits miroirs ovales y sont adaptés extérieurement. La manœuvre de l’éventail est une science, une langue par signes à l’usage de la créole espagnole ; elle cause ainsi quand elle le veut avec son ami de cœur.

Dans les salons de Cuba il y a deux rangées de balançoires de forme espagnole ou de forme américaine. Les premières sont plus grandioses, mais aussi plus lourdes. Les balançoires sont établies dans l’intérieur, On y est assis, on cause en se balançant, s’éventant, tandis que le vent entre par les fenêtres. On prend du thé et l’on mange des bonbons. Les créoles espagnoles ont de jolis yeux bruns et doux, un très-bon jugement naturel, à ce qu’on dit, même de l’esprit, mais elles sont fort ignorantes. Dans leurs maisons elles s’occupent surtout à broder, à faire toilette, à recevoir des visites.

Je ferai encore une course avec mes hôtes pour remonter la Canima, l’une des plus belles rivières de Cuba ; elle n’est pas fort éloignée d’ici. Puis je dirai adieu à Matanzas.

Le 13 avril au soir.

Nous nous sommes mis en route hier matin avant le lever du soleil, madame Baley, son frère Philippe et moi. Au moment où nous démarrions de Matanzas, le soleil sortait