Page:Bremer - La vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 3.djvu/148

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
140
LA VIE DE FAMILLE

tout leur développement humain, de la considération, et gagner leur vie par leur propre mérite. Mais à Cuba — que faire de cinq filles ? Le mariage est l’unique moyen de parvenir à la considération, d’avoir du pain ; mais il n’est pas facile de s’y marier, de pourvoir honnêtement à sa subsistance. Deux des filles de madame W… sont extrêmement jolies : l’aînée, complétement blonde, a le plus beau profil. Elle est fiancée à un jeune militaire. Il arrive souvent ici que le mariage ne succède point à l’amour et aux fiançailles.

Parmi les personnes qui m’ont présenté de l’intérêt se trouve un jeune magistrat espagnol, plus agréable et franc qu’on ne l’est d’ordinaire. J’ai appris par lui beaucoup de choses sur la législation et les rapports de l’île quant aux esclaves. Cardinas m’a semblé du reste une petite ville peu agréable ; mais des personnes bienveillantes m’ont fait voir dans les environs des objets du plus grand intérêt pour moi. L’un d’eux est une plantation de caféiers en pleine floraison. Cette plante fleurit une fois par mois dans toutes les plantations à la fois. Les fleurs qui éclosent le matin sont complétement fanées le soir. La première floraison a lieu en février, la dernière en novembre. Ces fleurs forment sur les branches des guirlandes blanches, des glanes serrées, produisent de jolis fruits d’abord verts, puis successivement rouges, et enfin brun foncé. C’est alors qu’on les cueille. Ils contiennent la féve du café, et la récolte en est continuelle pendant trois à quatre mois de l’année. Cette plantation étant, comme je viens de le dire, en floraison complète, on aurait dit des buissons verts sur lesquels serait tombée de la neige. Les feuilles du caféier sont d’un joli vert de vessie, lisses, et ressemblent à celles du laurier ; la fleur rappelle l’hyacinthe