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LA VIE DE FAMILLE

désapprouvant dans une église. La mantille espagnole (on dit qu’elle passe de mode) est d’un effet infiniment pittoresque ; même les négresses et les mulâtresses en font usage. On dirait presque un long châle d’étoffe plus serrée, jeté sur la tête afin de la garantir du soleil quand on sort. J’ai vu quelquefois, et encore aujourd’hui, des femmes qui, évidemment, n’étaient pas pauvres, porter des robes de grosse toile grise à sac, avec châle long de même tissu sur la tête. On m’a dit que c’était par suite d’un vœu fait par elles ou les leurs dans un cas fâcheux ou de maladie.

Je quitterai Matanzas à deux heures pour aller avec mes hôtes dans une plantation ouvrière qui appartient aux parents de madame Baley, dans une jolie contrée appelée Limonar, à quinze milles d’ici environ. J’y étudierai les arbres, les fleurs et ce que Dieu voudra. Après avoir passé quelques jours à Limonar, j’irai chez madame de Conick. Elle habite une grande plantation de même nature entre Matanzas et la ville de Cardinas ; on ne m’y laissera point manquer d’occasions pour voir le pays et ses habitants. Je ne puis exprimer combien je suis reconnaissante de tant de bonté.




Ariadne-Inhegno, le 7 mars.

J’ai déjà passé une semaine ici, au sein même de l’esclavage sans voile. Ce spectacle m’a tellement abattue pendant les premiers jours, que je n’étais, pour ainsi dire, propre à rien. Près de ma fenêtre, — du corps de logis