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LA VIE DE FAMILLE

maux de toute espèce, sur le pont, dessous et au-dessus de nous. Des bœufs énormes, si gros qu’ils marchent à peine, des vaches, des veaux, des mulets, des chevaux, des moutons, des bandes entières de porcs font entendre leurs cris du pont inférieur, et nous envoient par moments des exhalaisons peu agréables ; sur le pont au-dessus de nous, caquètent des dindons, des oies, des canards, des poules ; les coqs chantent et se battent, et des petits cochons de lait courent joyeusement entre les cages des volailles.

Il fait très-bon sur le pont du milieu ; le salon des femmes est spacieux et joli, le nombre des voyageurs petit et agréable. Je suis seule dans ma cabine et me porte comme une princesse de la fable. Mon compagnon de voyage, M. Lerner Harrison, fait partie des Américains au cœur énergique et chaud. C’est de plus un fort joli homme. Il possède ce mélange de cordialité et de politesse fraternelle à l’égard d’une femme confiée à ses soins, qui fait de l’homme du Nouveau-Monde la société la plus agréable qu’une femme, et de plus une étrangère, puisse désirer. Il n’y a pas de nourrisson criard à bord, et nous ne nous inquiétons pas du grognement des porcs, ni des cris des animaux de notre arche de Noë ; ils sont tous destinés à la foire de Noël de la Nouvelle-Orléans.

Le 19 décembre.

Le Mississipi-Missouri coule bourbeux et large par suite de ses eaux montantes ; il est encombré de bois flottant, de troncs d’arbres, de souches qui parfois nous donnent de rudes secousses. Les bords sont bas et marécageux, couverts de forêts à feuilles rondes mais dépouillées, et d’une espèce de peuplier appelé arbre-coton. C’est bien