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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

grandes maisons, des maisons de plus en plus grandes (cris de jubilation et trépignements) ; qui construit des églises (redoublement de cris), des églises toujours plus nombreuses et plus grandes. (Les trépignements, les battements de mains prennent une force croissante.) Ce peuple augmente en nombre ; sa capacité, son bien-être, sa raison se développent ; le peuple dominant du pays commence à s’effrayer et à se dire : Ils deviennent trop forts ; envoyons-les à Libéria. (Grande fermentation et émotion.) Il paraît donc, mes frères, que Dieu est avec nous. Ne l’abandonnons pas, car il nous tirera de l’esclavage et fera de nous un grand peuple ! (Ravissement extrême et joie, accompagnés des exclamations suivantes : « Amen ! Oui ! oui ! O gloire ! » etc., etc.) L’auditoire ressemble, pendant quelques minutes, à une mer orageuse. Le discours du prédicateur avait été un torrent mugissant d’éloquence naturelle. Je doute, cependant, que son patriotisme se soit étendu beaucoup au delà de l’expansion du moment et de la chaire où il parlait. Ce n’était pas un nouveau Moïse ; l’ancien était un homme d’action, et parlait avec peine.

C’est le premier sermon prononcé par un nègre, où je voyais percer le sentiment de la nationalité. Que le bill contre les esclaves fugitifs fasse attention à ce qu’il produira !

Quant à la sortie du prédicateur contre Libéria, il est bon de dire que les noirs de l’Ohio sont, en général, contraires à la colonisation en Afrique, et regardent d’un œil de défiance les efforts des blancs en faveur de cette colonie. Malheureusement, le climat de Libéria est, dit-on, très-malsain, par suite de ses pluies constantes, ce qui justifie en quelque sorte les appréhensions des nègres. C’est