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LA VIE DE FAMILLE

Cette exhortation fut accueillie avec force soupirs plaintifs et des exclamations gémissantes.

Le prédicateur annonça ensuite la mort de sœur Bryant, et raconta sa belle fin chrétienne ; il lui appliqua les paroles de l’Apocalypse sur ceux qui sortent d’une grande affliction[1]. L’intention de la souffrance sur la terre, le magnifique groupe des enfants de la douleur, leur délivrance et leurs actions de grâces, tout ceci fut exposé par le prédicateur nègre d’une manière spéciale, noble, et basée sur l’Écriture, en pleine lumière du soleil, et comme je ne l’avais pas entendu exprimer par les prêtres de la race blanche. Ensuite il se perdit pour ainsi dire dans une prière sans fin, pour le veuf affligé et ses enfants, « ces petites âmes florissantes. » Puis vint le sermon proprement dit, et le prédicateur proposa cette question à l’assemblée : « Dieu est-il avec nous ? — Je parle de notre nation, mes frères ; j’ai en vue notre nationalité. Examinons la chose. »

Il fit ensuite un parallèle fort ingénieux entre la captivité des Israélites en Égypte, celle des nègres en Amérique, et les preuves par lesquelles la Providence avait montré le soin spécial qu’elle prenait du peuple choisi. Après avoir présenté le tableau de la position des Israélites sous Pharaon et Moïse, il passa à la méditation sur la destinée des nègres : « Comment saurons-nous si Dieu est avec nous ? Examinons-le. »

Il traça hardiment l’esquisse d’un peuple réduit en esclavage, « opprimé de toutes manières, mais dont le nombre augmente, qui s’améliore et rachète sa liberté (cris de : Oui ! oui ! O gloire !) ; qui achète des terres de plus en plus vastes (exclamations croissantes) ; bâtit des maisons, de

  1. Chapitre VII, versets 9 et suivants. (Note de l’Auteur.)