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LA VIE DE FAMILLE

contrées, c’est l’empreinte d’un pied humain dans l’île inhabitée de Robinson. Plus loin sont les forêts primitives et le désert où habitent les animaux sauvages et des Indiens en lutte perpétuelle.

Non loin de là sont les Prairies immenses, ces déserts richement fleuris de la vallée du Mississipi, où l’herbe forme des vagues ondoyantes et profondes, se prolongeant au loin, très-loin vers l’horizon, sans que la main de l’homme les ait touchées ; car il n’y en a point ici pour les faucher dans leur millième partie. Le Niagara, et tout ce que j’ai vu de remarquable soit dans le Nouveau-Monde, soit en Europe, n’a pas produit sur moi l’impression de la perspective de ces Prairies sans limites de la vallée du Mississipi ; elles croissent en étendue plus on approche du fleuve. C’est une vue splendide que ces vagues océaniques formées par des élianthes, de hautes herbes sous le ciel de l’Amérique, éclairées par le soleil, ou obscurcies par les nuées légères qui le traversent. L’âme s’étend et s’ouvre pour ainsi dire au vent doux et libre qui s’avance en murmurant sur ces champs, et fait résonner mélodieusement en passant les fils électro-magnétiques tendus au-dessus. Ce voyage dans l’Ouest a été pour moi une fête continuelle, tandis que je volais, avec les ailes de la vapeur, dans les Prairies, vers le soleil doré ; il me semblait entrer ainsi dans un monde lumineux.

La vallée du Mississipi, depuis le Minnesota au nord jusqu’à la Louisiane au sud, entre la chaîne des monts Alleghany à l’est et les montagnes Rocheuses à l’ouest, est une immense prairie ondulée par des collines. Le sol est des plus fertiles, richement arrosé par des rivières et des lacs, montagneux au nord avec sapins et bouleaux septentrionaux. Ces champs s’abaissent à mesure qu’ils