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LA VIE DE FAMILLE

entrer un jour comme État indien indépendant dans la confédération des États-Unis.

Le Missouri est un État à esclaves, mais il paraît conserver cette institution par bravade plutôt que par conviction de sa nécessité, car il n’a pas de produits que les blancs ne puissent cultiver, et son climat n’appartient pas à la zone brûlante du Sud. Aussi vend-il activement ses esclaves dans le Sud.

« Es-tu chrétienne ? demandai-je à une jeune et jolie mulâtresse qui me sert ici.

— Non, mame.

— Tu es baptisée ; tu as reçu une instruction chrétienne ?

— Oui, mame. J’ai pour marraine une négresse fort dévote ; elle m’a instruite.

— Est-ce que tu ne crois pas ce qu’elle t’a dit du Christ ?

— Si fait, mame ; mais je ne le sens pas ici. » Et elle posa la main sur son cœur.

« Où as-tu été élevée ?

— Bien au-dessus du Mississipi, loin, bien loin d’ici.

— Ceux à qui tu appartenais étaient-ils bons envers toi ?

— Oui, mame ; ils ne m’ont jamais adressé une parole méchante.

— Es-tu mariée ?

— Oui, mame, mais mon mari est fort loin, chez le maître auquel il appartient.

— As-tu des enfants ?

— J’en ai eu six, il ne m’en reste pas un seul. Trois sont morts et les trois autres ont été vendus. Quand on m’a enlevé le dernier, la petite fille, j’ai cru que je ne