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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

tellement, qu’il n’a pas voulu prendre une autre femme, et ne lui permet pas de porter des fardeaux pesants. Il se procure toujours un cheval quand elle doit aller à la ville. Elle s’appelle Moschpedaga-Wen, ou la femme Nuage de plume. Une jeune fille indienne qui l’accompagnait était plus tatouée, mais bien moins jolie ; elle avait les traits lourds et la pesante expression qui distingue les Indiennes, du moins de cette tribu.

J’ai dessiné Nuage de plume dans sa toilette de mariée ; elle était timide, tenait toujours les yeux baissés. C’était avec un plaisir mélangé d’émotion que je me plongeais dans les mystères de ce visage. Tout un monde de nuit existait dans ces yeux dont la paupière, à frange noire, répandait une ombre marquée sur la joue. Ces yeux regardaient dans l’abîme, rêvaient tranquillement sans former de souhaits, et sans joie dans l’avenir. Nuage de plume n’avait pas de lumière en elle, mais elle était éclairée extérieurement, et agréablement peinte pour un instant.

Après cette douce, belle et mélancolique figure, je te présente le vaillant et jeune guerrier, le grand Skouka-Skaw, ou « chien blanc » son mari, complétement peint, en grande parure, avec un énorme plumet rouge en forme de casque, descendant de la tête le long du dos, et trois sombres plumes d’aigle à houppe de laine rouge sur la tête, indiquant qu’il était un vaillant guerrier qui avait tué beaucoup d’ennemis. Chien-Blanc était de haute taille, svelte ; il entra d’un air gai, jovial, en débitant un flux de paroles dont je ne compris pas un mot. Sa figure a le caractère que j’ai déjà remarqué chez les jeunes Indiens, nez d’épervier large à sa base ; yeux clairs, perçants, mais froids, ouverts carrément avec un regard animal ; bouche désagréable, du reste les traits réguliers et saillants. Je fis