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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

donnant un baiser spirituel, car je présume que vous n’en voudriez pas d’autre. — « Nous ne sommes pas étroites à ce point, » dit une jeune fille en souriant, en avançant sa jolie tête et en m’embrassant. Les autres l’imitèrent, et nous nous embrassâmes cordialement. Comme les jeunes filles souriaient : « Je ne croyais pas, leur dis-je, que vous pouviez sourire. » Et elles recommencèrent avec bonté et douceur. L’une des plus âgées dit : « Je ne voudrais pas pour beaucoup être privée de mon bon rire ! » Elles étaient véritablement gracieuses, agréables, mille fois plus que certaines femmes du monde et irréfléchies de l’hôtel de New-Libanon, qui prenaient un air hautain et important en parlant des « pauvres Trembleurs. »

Leur société m’a laissé une impression favorable, et j’ai ouï dire à des personnes qui ont été pendant plusieurs années en rapport avec elle, beaucoup de bien des Trembleurs, surtout relativement à leur vie tout empreinte d’amour chrétien, leur bonté envers les pauvres, et les soins tendres qu’ils donnent aux enfants qui leur sont confiés, soit par les pauvres en dehors de leur société, soit par les familles qui en deviennent membres et vivent alors sans reconnaître les liens naturels. Les soins qu’ils donnent aux malades de leur société sont parfaits aussi, à ce que m’a dit mon petit docteur féminin de Boston, mademoiselle Hunt, médecin de deux ou trois sociétés de Trembleurs. Elle m’a parlé de mainte existence humaine aigrie par le monde, d’époux malheureux, de femmes isolées, d’hommes rudement éprouvés par les chagrins, qui ont trouvé chez les Trembleurs un port à l’abri des orages de chaque jour, des amis, des soins, le comfort et la paix de la vie, dont ils n’auraient pas pu jouir dans le monde. Ces sociétés sont des communautés monastiques mitigées,