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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

mademoiselle Lynch, où j’ai vu quantité de gens, entre autres le poëte Bryant; il a une belle tête caractéristique à chevelure bouclée parsemée de gris.

De chez mademoiselle Linch, j’ai été menée par un aimable et loyal professeur — appelé Hacklitt, je crois, — aux Champs-Élysées, dans une île voisine de New-York, beau parc ainsi nommé à cause de sa poétique nature. Le temps et l’air étaient également ravissants; nous n’avons rien de pareil dans notre Vieux-Monde, du moins je n’ai jamais rien rencontré de semblable. Je hume cet air comme si c’était du nectar; il m’enivre presque délicieusement, et doit appartenir, à cette époque de l’année, à la vie magique de l’été indien. Je me suis donc promenée dans les Champs-Élysées avec de véritables sentiments élyséens; j’ai vu des masses de voiles blanches descendre l’Hudson comme des messagères de paix ailées, et j’ai laissé voguer mes pensées vers les amis que j’ai sur ses bords, amis nouveaux et cependant bien chers, éloignés et cependant si proches de mon cœur. Cette journée dans les Champs-Élysées du Nouveau-Monde a été ravissante. Mon professeur était bon et sage comme Mentor, plus sage, je crois, car il ne faisait pas de discours, m’accompagnait avec bienveillance, semblait jouir de ma satisfaction. Le soir il m’a fait traverser «East-River» et m’a conduite à Rose-Cottage dans le paisible Brooklyn. Je m’y reposerai quelques jours loin du monde.

Maintenant un mot sur mes nouveaux amis Marcus et Rebecca Spring. Ils sont d’une espèce tout à fait particulière, simples, humains, doués d’un esprit lucide, et me semblent angéliques. Dès mon premier dîner chez eux, ils m’appelèrent par mon nom de baptême et me dirent d’agir de même à leur égard. Je vis donc avec eux intime-